La vénus de la vallée Mosane, de Olivier Papleux

Je ne m’étais jamais beaucoup soucié d’anthropologie jusqu’à ce jour. quelques visites dans des musées, ou dans des sites du Périgord certes, mais rien de plus. C’est pourquoi j’ai été étonné quand j’ai revu Carol à cette soirée et qu’elle m’a expliqué très sérieusement, et avec enthousiasme, qu’elle avait délaissé cette année l’histoire de l’art pour s’inscrire à un cours d’anthropologie. Tiens, lui-ai-je dit, ça me fait penser à un roman dont je viens de terminer la lecture, d’un auteur belge, Olivier Papleux. Ah bon ? Et tu l’as trouvé comment ? Très intéressant, à la fois pour l’intrigue bien sûr, mais aussi pour tout ce que l’on apprend autour … Anthropologie, mais aussi biologie et génétique. L’auteur a dû se documenter sérieusement, ou alors il est passionné depuis longtemps par ces sujets. Carol a sorti de son sac à main son téléphone pour noter le titre du roman. Je lui ai tenu sa coupe de champagne pendant qu’elle pianotait sur son téléphone.

Plus tard, j’ai repensé à notre conversation. J’avais certes appris pas mal de choses en lisant ce roman , par exemple que « l’ADN des gorilles est à 98,4% identique à celui des humains », mais était-ce cette mine de connaissances qui avait motivé mon intérêt ? Je me suis dit que pour ma part, ce que j’avais préféré dans ce roman, ce sont les contrastes entre les caractères des personnages principaux et aussi leur actualité.

Au départ de cette histoire, il y a une petite famille qui fonctionne assez bien, André, ouvrier couvreur, Eve sa femme, employée dans la même entreprise et leur fils adoptif, Emmanuel, adopté, d’origine Copte, dont les vrais parents ont été assassinés en Égypte. Puis un incident, ou un heureux événement, pour ce couple qui avait sans doute des difficultés à avoir un enfant. Eve se retrouve enceinte. Situation déséquilibrante pour Emmanuel, mais aussi pour ses parents, car dans la famille d’Eve, mère et grand-mère n’ont pas survécu à l’accouchement. Cela pourrait-être dû au fait que, comme le dit un biologiste, « le génome nucléaire de votre femme possède presque 6% de gènes hérités de l’homme de Néandertal ». Pour vaincre cette fatalité, André va se lancer dans une enquête génétique approfondie, et y associer son fils adoptif.

Drôle de type cet André… Un peu invasif pour ses proches, persuadé que la science vient à bout de tous les problèmes et va donc sauver sa femme. Il envoie même son fils adoptif fouiller de nuit la tombe de la grand-mère pour en ramener un os et de l’ADN ! Mais a contrario d’Eve, sa recherche ne le libère pas de ses angoisses. Sa femme, affiche elle, inquiétude et sérénité en même temps. Sans doute grâce à sa foi profonde: « Eve pratique d’instinct une foi catholique héritée de ses grands parents paternels » (habituellement, c’est plutôt la religion que l’on pratique, et d’autant mieux que la foi est bien là, mais on ne va pas chipoter…). Voilà donc André et son fils partis pour une enquête qui va occuper toutes leurs (très) grandes vacances. Un peu surprenant de voir un ouvrier couvreur disposer de tout ce temps libre en été, car c’est traditionnellement la bonne saison où ce corps de métier travaille le plus, mais il est vrai qu’André fait partie de la famille du fondateur de l’entreprise… Une consultation avec une spécialiste généticienne lui apprend que l’élément déclencheur de ces morts mystérieuses se trouve dans une certaine zone de l’ADN d’Eve, mais nos amis se heurtent à la lenteur administrative nécessaire aux analyses et au peu d’empressement du médecin.  » Le monde n’est motivé que par le fric et la gloriole » et il faudrait un « incitant honorifique » (publication, découverte) pour que les généticiens professionnels s’intéressent à leur cas. La rencontre avec Hélène Berger, docteur en anthropologie et une visite dans la vallée de la Vézère permettront-elles de débloquer la situation ? Eve sera-t-elle sauvée ? Il faudra pour cela une étonnante concordance génétique entre Eve et la dame de Goyet pour motiver les chercheurs de l’institut Pasteur, avides de gloire et faire en sorte que la jeune femme puisse recevoir la tri thérapie qui la sauvera. Le suspens dure jusqu’à la dernière « lune » du livre (ce roman est organisé non pas en chapitres mais en lunes) et on le referme avec tendresse en pensant à cette petite famille agrandie par la naissance de Marie, qui va pouvoir continuer son chemin.

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