Méditations poétiques – 1

Il est difficile d’échapper à Alphonse de Lamartine quand on réside près du lac du Bourget. Sa statue trône au bord de l’eau, lieu de visite obligé des bateaux de croisière. Un restaurateur local a même baptisé son établissement Ô Lac, mélange douteux de pub irlandais et de poésie… Vient forcément le moment où on a envie d’en savoir plus que les quelques strophes de  la méditation poétique numéro XIII, Ainsi toujours poussé vers de nouveaux rivages…

Pour cette immersion dans le recueil des méditations poétiques, j’ai choisi l’édition de 1827, préfacée par l’académicien Charles Nodier. lamartineLamartine est alors jeune  et en pleine gloire. Son recueil, paru en 1820, a connu un sujet immédiat. Le poète a rencontrée Julie Charles en 1816 à Aix les Bains, et les deux amants ont vécu quelques journées idylliques au bord du lac du Bourget. Ils se sont revus à Paris, mais le rendez-vous de 1817 à Aix n’aura jamais lieu, Julie étant hélas décédée de la tuberculose à 33 ans. Sur la nature de cette relation éphémère, beaucoup se sont interrogés, pour savoir s’il s’agissait d’une relation platonique ou consommée. Nous ferons confiance ici à la Revue italienne d’études françaises et à l’article d’Olivier Bivort:

https://journals.openedition.org/rief/2559  

L’auteur, en connaissance de la publication des lettres de Julie Charles, opte pour la seconde hypothèse. Quoi-qu’il en soit, la pauvre Julie aura servi de tremplin littéraire pour Lamartine, puisque les méditations sont presque entièrement inspirées de son souvenir et des regrets dee l’auteur qui, à l’en croire, n’aspirerait plus qu’à la retrouver dans l’au-delà (ou l’eau du lac ? ).  Avant de conclure ce premier petit billet, plongeons-nous dans la troisième méditation, A Elvire (car la coutume bizarre d’accentuer les majuscules ne sévissait pas encore en 1820).

Oui, l’Anio murmure encore Lamartine

le doux nom de Cinthie aux rochers de Tibur ;

Vaucluse a retenu le nom chéri de Laure;

Nous constatons que d’emblée,  le poète se place en égal de Properce ( I er siècle av. J.-C) et de Pétrarque. Son Elvire est appelée à égaler Cinthie et Laure dans les siècles à venir, et même la Béatrice de Dante. (Au passage, remarquons que s’il est un point commun entre Lamartine et Chateaubriand, outre le fait d’avoir tous deux tâté de la politique, c’est sans doute d’être persuadé de leur propre valeur…). Avec, pour ces héroïnes, une gradation évidente vers la modernité, mais la même inaccessibilité au bout du compte.

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